Addis-Abeba


Capitale du pays mais aussi capitale diplomatique de l'Afrique, où se réunissent toutes les ambassades et institutions continentales et internationales, Addis-Abeba compte aujourd'hui 3 350 000 habitants. C'est une ville moderne aux larges avenues bordées d'immeubles - le plus souvent en construction, et il ne reste pas grand chose des origines : fondée fin XIXème par l'impératrice qui appréciait cette région centrale au climat agréable (on est encore à 2500 mètres d'altitude !), la ville s'est rapidement développée et a bien failli disparaître après quelques décennies, à cause de l'épuisement des ressources d'eau et de bois à proximité. Mais les techniques hydrauliques récentes et l'introduction de l'eucalyptus à croissance rapide ont sauvé celle qui allait devenir cette métropole en ébullition... et dont le charme, franchement, n'est pas évident.



Nous étions logés au Ras hôtel, le deuxième plus ancien du pays, un établissement un peu fané dont la réputation est d'avoir accueilli Nelson Mandela pendant son exil.



Toute la cité est en chantier, des grues et d'immenses blocs de béton hérissent les collines. Il y a parfois un peu d'effort architectural, mais dans l'ensemble c'est plutôt laid ou au mieux banal. Tant qu'à faire sortir une capitale africaine de terre, quel dommage de ne pas lui donner cohérence et âme. On pensait notamment à l'inspiration du Wakanda du film Black Panther, et on n'est pas les seuls.





Les boutiques sont nettement plus variées que dans le reste du pays, mais on n'a quand même pas eu l'impression d'un commerce effréné. A noter qu'il existe aussi un quartier ultra-moderne avec les boutiques de luxe occidentales, mais on n'est pas allés par là.



Adresse visiblement mentionnée par tous les guides (à notre passage la clientèle était exclusivement étrangère), le café traditionnel Tomoca se targue de proposer le meilleur de la ville. Si vous êtes à côté, pourquoi pas, mais on a été déçus d'avoir fait un détour exprès : système compliqué et peu efficace de jetons, employées peu aimables, cohue, pas de place pour s'asseoir, et café certes bon mais pas meilleur que sur les trottoirs des petites villes... où il était servi avec le sourire en prime !



On a rarement vu ville autant en chantier, un immeuble sur deux semble en construction ou en rénovation. Malgré l'ampleur de certains projets, on retrouve des éléments vus au nord : échaffaudages de bois branlant, mesures approximatives (notamment les escaliers, les marches ne font jamais la même taille !) et ordre d'intervention des corps de métiers parfois curieux, par exemple la peinture de finition est faite alors qu'il reste des étages à monter... et même la façade à faire !



Plusieurs places comémoratives rythment la ville, ci-dessous celle portant le Lion de Judas, symbole de la monarchie éthiopienne. Les larges avenues qui les relient sont les seules à avoir un nom. Pour les autres rues, bah, faut se débrouiller, demander, prendre un point de repère comme un hôtel célèbre...



L'imposante cathédrale de la Sainte Trinité est surtout intéressante pour certains de ses éléments intérieurs : peintures contemporaines, trônes et tombeau d'Halié Selassié, mais aussi vitraux représentant les saints spécifiques du pays, comme Takla Haymanot, un moine mort en 1313 qui est resté debout à prier pendant 27 ans jusqu'à ce qu'une de ses jambes pourisse et tombe. Il a continué à prier sur l'autre, et lorsque qu'elle a cédé à son tour, il a gagné six petites ailes pour continuer ! Pendant tout ce temps, c'est un oiseau qui le nourissait, à raison d'une graine par an.





Le parc de la cathédrale n'est pas super entretenu mais c'est l'occasion d'un peu de fraîcheur et de relative verdure. On y trouve une petite église bien plus traditionnelle, un cimetière avec des gens connus (dont Sylvia Pankhurst, cheffe de file des suffragettes britanniques, pourquoi pas), un musée...



L'université est perchée sur une hauteur, on a marché des kilomètres pour l'atteindre... mais deux fois en vain ! Faute d'électricité, le musée d'ethnologie qu'elle renferme, censé être un des plus beaux d'Afrique, était fermé. Pourtant les boutiques autour se débrouillaient, ainsi que le chantier hideux de bâtiments modernes construits au sein même de son enceinte historique, qui était celle du palais d'Halié Sélassié.



Heureusement, le Musée National, était lui bien ouvert. Enfin, presque, une partie était fermée et plongée dans la pénombre, mais le sous-sol qui est le plus intéressant pour nous était heureusement bien présenté et accessible. Dans la galerie sur l'évolution, on y admire une réplique du squelette de notre lointaine cousine australopithèque Lucy.





Star locale qu'on retrouve jusqu'au logo des taxis, Lucy est aussi l'emblème du restaurant voisin du musée, qui accueille les groupes de touristes. Très cher par rapport aux standards du pays, on y a plutôt bien mangé et surtout dans un décor très joli et frais, à l'ombre bienvenue des feuillages.



Parler de "vieille ville" pour une cité fondée il y a à peine un siècle, et surtout vu les vestiges millénaires des villes du nord, c'est un peu exagéré, mais disons qu'il y a encore des quartiers que les tours n'ont pas envahis. Quelques petits immeubles vaguement art déco, mais surtout des cabanes en tôle, des rues plus étroites, une ambiance relativement calme.







Si on a une adresse à conseiller à Addis, c'est le Taitu Hotel. Ancien palais de l'impératrice, construit en 1907, c'est le plus ancien hôtel de la ville. Il a conservé l'ensemble de son aspect d'époque malgré un incendie partiel. On n'y a pas logé, mais super bien mangé, un buffet à volonté frais, très bon.





Les maisons anciennes se font bien rares, et semblent parfois sur le point de s'effondrer. On a beaucoup marché, d'un bout à l'autre de la capitale, en traversant parfois des quartiers plus proches du bidonville, mais relativement propres.



Soudain, au détour d'une avenue, une foule compacte agitant des drapeaux, des cris, des flics... une manif ? Non ! Encore une fois - décidément c'est un don récurrent de nos voyages - nous tombons par pur hasard sur une grande fête populaire, en l'occurence qui célèbre la bataille d'Adoua, quand les forces de l'Empire éthiopien du négus negest Menelik II ont résisté à celles du royaume d’Italie dirigées par le colonel Baratieri, en 1896. Malgré un déséquilibre technologique important, cette victoire inattendue, la plus grosse défaite infligée à une armée coloniale, a préservé l'indépendance - bien que l'Ethiopie ait perdu au passage ce qui est devenu l'Erythrée et la Somalie.





Malgré le monde, l'athmosphère est détendue, festive, et si outre les tenues traditionnelles de nombreuses personnes portent des armes, elles sont presque toujours factices, même en bois et en carton, aucun tir en l'air ni geste menaçant comme on a pu en voir ailleurs dans des conditions similaires.







Ci-dessous, la cathédrale Saint Georges a été construite par Ménélik II pour célébrer la bataille d'Adoua, ça tombe bien. Elle est du coup au coeur d'une foule compacte tout habillée de blanc, avec prêcheurs, lectures de la Bible en amarhique et discours, sans oublier des petits vendeurs de bondieuseries.









La fête se poursuit dans les rues avec notamment une impressionnante et bigarrée calvacade... escortée par un blindé !


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