Et vous, si on parle du Varsovie moderne, vous en avez quelle image ? Nous, on ne savait pas à quoi s'attendre. Ghetto, massacres, Europe de l'Est, destructions... oui mais depuis, où en est-on ? La capitale compte avec son agglomération près de 3 millions d'habitants. Cité moderne et dynamique, pleine de jeunes et de boutiques de fringues, les mêmes que partout, elle aligne ses grandes avenues, ses immeubles de verre côtoyant ceux de l'héritage soviétique. Ci-dessus, cet espèce d'Empire State Building tronqué est le Palac Kultury, initialement nommé "Joseph Staline". Il abrite des institutions officielles, musées, théâtres, piscines, cinémas, centre de congrès...







Ci-dessus, parkings et cinémas ultra-modernes. Ci-dessous, les Halles Mirovska.





Impression étrange dont on ne parvient pas à se défaire, celle de voir en superposition deux villes. La moderne, vivante, amnésique, tournée vers l'avenir. Et le fantôme de celle qu'elle fut, rasée presque entièrement par la folie destructive des nazis, qui allèrent jusqu'à dynamiter les ruines encore à peu près debout.



Les photos ci-dessus et dessous sont prises sur une expo en plein air des images d'un photographe américain parcourant les décombres juste après la libération avec un rare appareil couleur. On mesure l'étendue du désastre, et on comprend que beaucoup souhaitaient tout simplement abandonner ce champs de gravats pour aller bâtir ailleurs. Mais le symbole était trop fort, et pendant des décennies, les Polonais ont rebâti leur capitale historique.



L'immeuble ci-dessous rue Prózna est le dernier vestige du ghetto. Bouclé par les Allemands en 1940 avec un demi-million de personnes dedans, ce quartier se révolte au printemps 1943 alors qu'il ne compte déjà plus que 60.000 habitants. En représailles, l'intégralité des survivants est exterminée. Pour ceux qui lisent l'anglais, on suggère vivement de lire "The Train to Warsaw", de Gwen Edelman.





30% de la population de la ville était juive, l'une des plus importantes communautés au monde. Pourtant, il ne reste presque rien de son existence, même les mémoriaux se font bien rares. Premier d'envergure, le musée de l'holocauste était encore en construction à notre passage, il ouvre fin 2013. 70 ans après... mieux vaut tard que jamais. Le bâtiment de Jeshajahu Weinberg est original et très beau, et il se sera suffisament fait attendre.



Ci-dessous, un monument dédié à la mémoire des héros de l'insurrection du ghetto en avril 1943, quelques centaines de personnes avec des armes de fortune ayant tenu tête à l'armée allemande pendant près d'un mois. Pour l'anecdote, son granit avait initialement été commandé par Hitler pour un monument à la gloire du IIIeme Reich. Au milieu, rencontre autour du portrait d'un diplomate ayant en vain tenté de prévenir l'Occident de ce qui se tramait à l'est. De rares survivants proposent leurs services pour des conférences ou vendent leur livre de souvenirs. Le wagon aux croix est un monument aux héros de l'inssurection de Varsovie, l'autre, quand les habitants se sont dressés contre les nazis, pendant que les Soviétiques attendaient tranquillement que la ville achève d'être détruite et saignée à blanc pour s'en emparer à moindre frais.



Ci-dessus à droite, remarquez la surélévation de la cité ouvrière Muranov... c'est qu'elle a été construite dès 1946, sur le remblai des ruines encore chaudes et des corps de 50.000 Juifs qui n'ont pas eu d'autre sépulture. Au point que les travaux ne se faisaient que de nuit pour ne pas trop voir les "détails". Ci-dessous, tous ces beaux immeubles assez anonymes remplacent le quartier juif anéanti. A droite, la seule synagogue (Nozik) encore debout parmi les 400 lieux de culte israélites d'avant la guerre, épargnée car utilisée comme magasin et garnison.